Épanode
L'épanode (substantif féminin), du grec ἐπάνοδος ("répétition") est une figure de style qui consiste à répéter des mots ou des groupes de mots qui semblent fonctionner de manière autonome syntaxiquement alors que la suite du texte montre que ceux-ci annonçaient en réalité un développement. On parle de structure épanodique ; proche de la régression et de la prolepse et propre au discours rhétorique. Dans son acception stylistique elle est un type d'anadiplose ; linguistiquement l'épanode est proche de l'épiphore ; néanmoins l'épanode est utilisée au niveau de l'argumentation et ne vise donc pas seulement l'effet esthétique. Elle vise une relance du discours argumentatif, l'accumulation avec explication des arguments, finalement elle cherche à convaincre l'interlocuteur.
Exemple
[modifier | modifier le code]« Cette grande pureté des bases de la Révolution française, la sublimité même de son objet, est précisément ce qui fait notre force et notre faiblesse ; notre force, parce qu'elle nous donne l'ascendant de la Vérité sur l'imposture, et les droits de l'intérêt public sur les intérêts privés ; notre faiblesse, parce qu'elle rallie contre nous tous les hommes vicieux, tous ceux qui dans leur cœurs méditaient de dépouiller le Peuple[1] [...] »
« C'est dans ce temps que naît une nouvelle figure d'homme, immobile, absent. Immobile sur la neige blanche, penché sur l'absence rouge, ne désirant plus rien du monde » (Christian Bobin): l'épanode peut parfois se fonder sur des termes de même sens mais grammaticalement différents (conjugués,substantivés...)
Définition
[modifier | modifier le code]Définition linguistique
[modifier | modifier le code]L'épanode opère une transformation morpho-syntaxique de répétition à l'identique ; plus globalement, selon C. Fromilhague, elle s'utilise pour développer, expliquer un ou plusieurs mots du groupe syntaxique précédent (donc déjà proférés). Elle est donc une opération de réassemblage d'un propos, mais sans modification puisqu'elle précise, par l'ajout d'arguments, une thèse. Linguistiquement, l'épanode appartient à la classe des répétitions.
Définition stylistique
[modifier | modifier le code]Elle a pour effet de marquer formellement un énoncé explicatif et/ou démonstratif. Souvent conjuguée à d'autres figures comme la parallélisme ou l'hypozeuxe, elle permet un dynamisme du discours, par la création d'effets de suspense, de précision, d'explication. L'effet est de nature illocutoire : assurer la conviction de l'interlocuteur.
Genres concernés
[modifier | modifier le code]L'épanode concerne tous les genres littéraires, en majorité ceux du discours argumentatif. Les tirades dramatiques utilisent ses ressources afin de marquer le ton des personnages devisant (les rhéteurs sont marqués par une maîtrise des procédés argumentatifs). Enfin, les moralistes et les essayistes en exploitent les ressources, souvent pour coller à une description, un portrait ou éthopée (comme chez Jean de La Bruyère ou le cardinal de Retz)
L'oral emploie souvent l'épanode, lors de prises de paroles en public comme les discours officiels ou politiques. La publicité en use modérément, étant donné la longueur souvent nécessaire à son développement discursif.
Historique de la notion
[modifier | modifier le code]Figures proches
[modifier | modifier le code]- Figure "mère": répétition
- Figures "filles": aucune
- Paronymes: régression, prolepse, épiphore
- Synonymes: anadiplose, précision
Débats
[modifier | modifier le code]L'épanode pose des problèmes de classification ; selon le niveau de langue considéré on peut la classer dans les répétitions ou dans les figures de construction discursive dite métatextuelle servant notamment à la narration (on parle en ce sens d'épanode narrative[2]) ; on ne la distingue pas toujours de l'anadiplose.
Notes et références
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- « revel.unice.fr/cnarra/document… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
Annexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Pierre Pellegrin (dir.) et Myriam Hecquet-Devienne, Aristote : Œuvres complètes, Éditions Flammarion, , 2923 p. (ISBN 978-2081273160), « Réfutations sophistiques », p. 457.
- Quintilien (trad. Jean Cousin), De l'Institution oratoire, t. I, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Budé Série Latine », , 392 p. (ISBN 2-2510-1202-8).
- Antoine Fouquelin, La Rhétorique françoise, Paris, A. Wechel, (ASIN B001C9C7IQ).
- César Chesneau Dumarsais, Des tropes ou Des différents sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue, Impr. de Delalain, (réimpr. Nouvelle édition augmentée de la Construction oratoire, par l’abbé Batteux), 362 p. (ASIN B001CAQJ52, lire en ligne).
- Pierre Fontanier, Les Figures du discours, Paris, Flammarion, (ISBN 2-0808-1015-4, lire en ligne).
- Patrick Bacry, Les Figures de style et autres procédés stylistiques, Paris, Belin, coll. « Collection Sujets », , 335 p. (ISBN 2-7011-1393-8).
- Bernard Dupriez, Gradus, les procédés littéraires, Paris, 10/18, coll. « Domaine français », , 540 p. (ISBN 2-2640-3709-1).
- Catherine Fromilhague, Les Figures de style, Paris, Armand Colin, coll. « 128 Lettres », 2010 (1re éd. nathan, 1995), 128 p. (ISBN 978-2-2003-5236-3).
- Georges Molinié et Michèle Aquien, Dictionnaire de rhétorique et de poétique, Paris, LGF - Livre de Poche, coll. « Encyclopédies d’aujourd’hui », , 350 p. (ISBN 2-2531-3017-6).
- Michel Pougeoise, Dictionnaire de rhétorique, Paris, Armand Colin, , 228 p., 16 cm × 24 cm (ISBN 978-2-2002-5239-7).
- Olivier Reboul, Introduction à la rhétorique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier cycle », , 256 p., 15 cm × 22 cm (ISBN 2-1304-3917-9).
- Hendrik Van Gorp, Dirk Delabastita, Georges Legros, Rainier Grutman et al., Dictionnaire des termes littéraires, Paris, Honoré Champion, , 533 p. (ISBN 978-2-7453-1325-6).
- Groupe µ, Rhétorique générale, Paris, Larousse, coll. « Langue et langage », .
- Nicole Ricalens-Pourchot, Dictionnaire des figures de style, Paris, Armand Colin, , 218 p. (ISBN 2-200-26457-7).
- Michel Jarrety (dir.), Lexique des termes littéraires, Paris, Le Livre de poche, , 475 p. (ISBN 978-2-253-06745-0).