Kingozi

Kingozi
Pays Kenya
Région Tana
Écriture ajami
Classification par famille
bantu
État de conservation
Éteinte

EXÉteinte
Menacée

CREn situation critique
SESérieusement en danger
DEEn danger
VUVulnérable
Sûre

NE Non menacée
Langue éteinte (EX) au sens de l’Atlas des langues en danger dans le monde

Le Kingozi est un ancien dialecte du swahili, souvent associé à la confédération ou sultanat d’Ozi[1], situé près de l’embouchure du fleuve Tana, entre le XVème et le XVIème siècle ap. J.-C.[2] et dont les sites sont abandonnés au XVIIème siècle. Il est considéré par la suite comme un dialecte littéraire prestigieux[3], utilisé notamment pour la poésie swahilie écrite en alphabet arabe, particulièrement entre Malindi et l’archipel de Lamu à partir du XVIIIème siècle ap. J.-C[4].

Origine et Histoire

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Le terme “swahili” vient de l’arabe “sahil”, signifiant côte ou rivage. Cependant, les Bantu avaient leur propre nom pour cette langue, qui était “Kingozi”[5]. Le Kingozi était la langue des Wangozi et est considéré comme l’ancienne forme du swahili, connue et utilisée par de nombreux poètes[3].

Statut Linguistique

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Le Kingozi est souvent vu comme un ancêtre du swahili moderne, bien qu’il ne soit pas le proto-swahili, qui est beaucoup plus ancien. En effet, le proto-swahili est la matrice commune à tous les dialectes swahilis et son origine est située entre les VIIIème et IXème siècle ap. J.C[4]. Sur le plan de la linguistique historique, le kingozi est considéré comme un dialecte swahili du Nord. Il est situé au même niveau généalogique[6] que les dialectes de l'archipel de Lamu: le kiamu, le kipate et le kisiu. Son apparition remonterait au XVème siècle ap. J.C.

Contribution à la Poésie Swahilie

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Le Kingozi a joué un rôle majeur dans la poésie swahilie, influençant les compositions littéraires avec son vocabulaire et ses structures grammaticales. Bien que considéré comme éteint, il laisse des traces[7] dans le corpus poétique du groupe de Lamu. Il a enrichi le répertoire poétique des compositeurs anciens et contemporains. Les manuscrits anciens sont écrits à l'aide de l'alphabet arabe.

mswada wa Hamziyya

Poètes Notables

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Plusieurs poètes célèbres ont utilisé le Kingozi dans leurs œuvres. Parmi eux, Fumo Liyongo, un poète et héros légendaire de la guerre opposant Ozi et la cité de Pate[2] suivant le folklore swahili et pokomo dont la tradition orale remonte au XVIème-XVIIIème siècle, est particulièrement notable. Ses poèmes, souvent attribués au Kingozi, sont parmi les plus anciens exemples de poésie swahilie[8]. Un autre exemple est la composition “Hamziyya”[9], qui est une œuvre marquante dans toute la région swahilie[5].

Débats Académiques

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Le statut du Kingozi est débattu. Certains le voient comme la langue de l’ancienne ville d’Ozi, qui serait devenue une koinè de l'océan indien au XVIIIème siècle, de l'actuelle Somalie aux Comores[3],[4],[1]. D’autres le considèrent comme un artefact littéraire utilisant des tournures archaïques et des mots rares empruntés à divers dialectes swahilis[10]. En 1987, Reinhard Klein-Arendt[7] a analysé un corpus exhaustif de manuscrits en Kingozi à l'aide d'un traitement de linguistique informatique. Il isole dans ce corpus un état ancien de la langue swahilie qui pourrait correspondre au kingozi dans une forme archaïque. Mais ce n'est pas la conclusion principale de l'étude qui est que la majorité de ces manuscrits littéraires anciens "kingozi" sont écrits en dialecte kiamu ! L'état archaïsant de la langue et les formes en kiamu peuvent cohabiter dans le même texte. Cela montre la complexité et l’hétérogénéité du Kingozi au niveau lexical et morphologique.

  • Ahmed Sheikh Nabhany, Mapisi ya Kiswahili (1995)[3] : « Le Kiswahili fait partie des langues bantu. Cette dénomination de swahili vient de l’arabe sahil qui veut dire côte ou rivage. Mais alors, ce nom est venu de l’arabe, est-ce à dire que les Bantu eux-mêmes n’avaient pas un nom pour s’appeler dans leur langue ? La réponse est non ! Il y en avait un et c’était les Wangozi et leur langue le Kingozi […] l’ancienne langue swahili est connue sous le nom de Kingozi et de nombreux poètes connaissaient ce nom; les compositions anciennes ont été écrites en Kingozi. »
  • R.P. Charles Sacleux, Grammaire des dialectes swahili (1909)[10] : « Ce qu’on appelle le Ki-ngozi est un dialecte poétique et arcane, exclusivement littéraire, réservé à certaines poésies, à des sentences sibyllines et à quelques proverbes. Ce n’est pas un langage parlé; ce n’est pas même une variété dialectale bien tranchée, attendu que le Kingozi varie considérablement d’un auteur à l’autre. C’est en réalité une forme libre, qui vise au purisme et à l’archaïsme, puisant pour cela dans les dialectes réputés les plus fidèles à l’état primitif de la langue, en première ligne le Kigunya, secondairement le Kiamu et le Kimvita. »

Références

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  1. a et b Captain C.H. Stigand, A grammar of dialectic changes in the Kiswahili language. With an introd. and a recension and poetical translation of the poem Inkishafi, a Swahili Speculum mundi, Cambridge University Press, (lire en ligne)
  2. a et b Thomas Vernet, LES CITES-ETATS SWAHILI DE L'ARCHIPEL DE LAMU, 1585-1810 DYNAMIQUES ENDOGENES, DYNAMIQUES EXOGENES, Paris, Thèse de doctorat en histoire, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, (lire en ligne)
  3. a b c et d (sw) Ahmed Sheikh Nabhany, « Mapisi ya Kiswahili », AAP, no 42,‎ (lire en ligne)
  4. a b et c (en) Jan Knappert, Four Centuries of Swahili Verse: A Literary History and Anthology, Darf, (ISBN 978-1-85077-181-4, lire en ligne)
  5. a et b Rocha Chimerah, « Kiswahili through the Ages : the Question of Lexicon », Mwanga wa Lugha,‎ sd (lire en ligne)
  6. (en) Jouni Filip Maho, NUGL Online. The online version of the New Updated Guthrie List, a referential classification of the Bantu languages, (lire en ligne)
  7. a et b (en) Reinhard Klein-Arendt, « Kingozi: Extinct Swahili Dialect or Poetic Jargon? A Historical, Dialectological and Contextual Analysis », Sprache und Geschichte in Afrika, vol. 8,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. Ahmed H. Parkar, « Ushairi wa Kingozi: the birth of Swahili poetry with specific reference to the seventeenth century Liyongo songs », preprint,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. Kineene wa Mutiso, « Kasida ya Hamziyyah (part 1) », preprint,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. a et b R.P. Charles Sacleux, Grammaire des dialectes Swahilis, Les PP. du Saint-Esprit, (lire en ligne)