Satyricon (film, 1969)

Satyricon

Titre original Fellini Satyricon
Réalisation Federico Fellini
Scénario Federico Fellini
Bernardino Zapponi
Brunello Rondi
Acteurs principaux
Sociétés de production PEA
Les Artistes associés
Pays de production Drapeau de la France France
Drapeau de l'Italie Italie
Genre Comédie dramatique
Péplum
Durée 129 minutes
Sortie 1969

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Satyricon (Fellini Satyricon) est un film franco-italien réalisé par Federico Fellini et sorti en 1969. Il est adapté du roman éponyme attribué à l'écrivain latin Pétrone[1].

Martin Potter lors du tournage.

Dans la Rome antique, Encolpe et Ascylte, deux étudiants qui cohabitent dans le quartier souterrain de Subure où ils vivent de rapines, se disputent les faveurs de leur jeune esclave Giton. Les trois comparses, tour à tour désunis et réunis, vont vivre différentes histoires au gré de leurs rencontres. Encolpe va assister au festin du nouveau riche affranchi Trimalcion tandis qu’on retrouve le trio prisonnier du terrible Lichas. Après l’assassinat de ce dernier et la chute de César, ce qui nous vaut de perdre de vue Giton, on rejoint Encolpe et Ascylte libérés qui passent un moment de répit dans une riche demeure désertée. Plus tard, ils enlèvent, en compagnie d’un brigand, un hermaphrodite censé être doté de certains pouvoirs. Ensuite, si Encolpe sort indemne de son combat avec le fabuleux Minotaure, il y laisse sa virilité. En compagnie d’Ascylte, il n’a alors de cesse de la retrouver en s’aventurant dans des contrées magiques ou ensorcelées comme le Jardin des délices ou celle de la légendaire Œnothée. Aux confins du pays, Ascylte perd la vie tandis qu’Encolpe recouvre sa virilité avant de s’embarquer vers une nouvelle île et une vie d’une autre dimension.

Fiche technique

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Robe de Danilo Donati pour Donyale Luna dans le rôle d'Œnothée.

Distribution

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  • Fellini versus Polidoro : à cause du réalisateur Gian Luigi Polidoro qui l'a devancé de quelques mois dans la réalisation de sa version du Satyricon (1968), Fellini a dû rajouter son nom au titre de son film, après avoir perdu son procès contre Polidoro. Pour ne pas concurrencer la version de Fellini, United Artists acheta le film de Polidoro[5].
  • Accroche française : « Un monde cruel et animal où le péché n'existe pas. »
  • Accroches américaines : « Rome before Christ. After Fellini. » Et aussi : « If you see with innocent eyes, everything is divine » (Fellini).

Origine du film

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Fondements de l'œuvre exposés par son réalisateur :

« J'avais relu Pétrone et j'avais été fort séduit par un détail que je n'avais pas su remarquer auparavant : les parties qui manquent, donc l'obscurité entre un épisode et l'autre. […] Cette histoire de fragments me fascinait pour de bon. […] Le livre me fait penser aux colonnes, aux têtes, aux yeux qui manquent, aux nez brisés, à toute la scénographie nécrologique de l'Appia Antica, voire en général aux musées archéologiques. Des fragments épars, des lambeaux qui resurgissent de ce qui pouvait bien être tenu aussi pour un songe, en grande partie remué et oublié. Non point une époque historique, qu'il est possible de reconstituer philologiquement d'après les documents, qui est attestée de manière positive, mais une grande galaxie onirique, plongée dans l'obscurité, au milieu de l'étincellement d'éclats flottants qui sont parvenus jusqu'à nous. Je crois que j'ai été séduit par la possibilité de reconstruire ce rêve, sa transparence énigmatique, sa clarté indéchiffrable. […] Le monde antique, me disais-je, n'a jamais existé, mais, indubitablement, nous l'avons rêvé. »

— Fellini par Fellini, entretiens avec Giovanni Grazzini, pp.139-140[7].

La sortie du film fit une profonde impression : les festins de Trimalcion furent parodiés dans la bande dessinée Astérix chez les Helvètes.

« Le film a été présenté en avant-première au Madison Square Garden, aussitôt après un concert de rock. Il y avait quelque dix mille jeunes gens. On respirait l'héroïne et le haschich dans la fumée de la salle. […] La projection ne fut qu'enthousiasme. À chaque plan, les gosses applaudissaient ; nombre d'entre eux dormaient, d'autres faisaient l'amour. Dans ce chaos total, le film se déroulait implacablement sur un écran gigantesque qui semblait refléter l'image de ce qui avait lieu dans la salle même. Satyricon semblait avoir trouvé son site naturel, de manière imprévisible et mystérieuse, dans ce milieu parmi les plus improbables. Il semblait bien n'être plus à moi, dans la révélation soudaine d'une entente aussi secrète, de liens aussi subtils et jamais interrompus, entre l'antique Rome de la mémoire et ce public fantastique de l'avenir. »

— Fellini par Fellini, entretiens avec Giovanni Grazzini, pp.140-141[7].

« Pauvre Fellini ! Son génie ne le lâche pas. Inguérissable, qu'il est. Voici son dernier chef-d'œuvre. […] C'est le film le plus génial de Fellini certainement, car il y a longtemps que je n'avais autant regardé ma montre pendant une projection et autant lorgné du côté de la sortie. Ah ! Qu'il avait donc du talent, Fellini, quand il n'avait que du talent ! »

— Michel Duran, Le Canard enchaîné, 17 décembre 1969.

« Le film se présente comme un chef-d'œuvre de cinéma à l'état pur, une création intime et personnelle, un feu d'artifice d'images bouleversantes de beauté. Que la démarche ne soit pas cartésienne, qu'il y ait dans le Satyricon beaucoup de rhétorique et de pathos, cela n'enlève rien à l’étonnante création de Fellini. […] C'est un film à dimensions multiples : on y sent la respiration du géant du cinéma qu'est l’auteur et sa volonté de faire autre chose que du carton-pâte. […] Il y a peu de cinéastes vivants capables de nous faire éprouver de pareilles émotions aujourd'hui. »

— Henry Chapier, Combat, 5 septembre 1969.

« C'est les yeux grands ouverts, toutes barrières mentales abolies, qu'il faut se laisser sombrer dans ce torrent halluciné, ce poème-fleuve d'une beauté monstrueuse et qui fait peur. Le Satyricon de Fellini est un film de médium qui fait appel aux forces obscures les plus élémentaires de l'âme. On ne l’approche pas sans alarme. »

— Claude Veillot, L'Express, 8 décembre 1969.

« Le spectacle est prodigieux. Terrible et sublime à la fois, parce que Fellini transcende la laideur en beauté. Son art de la mise en scène, son génie plastique, cette inspiration baroque qui lui permet d'orchestrer en virtuose ses délires, cette aisance de grand seigneur pour tirer parti des gigantesques moyens offerts à sa prodigalité, nous valent des séquences inoubliables. Il arrive pourtant que cette suite de “tableaux” sans structure dramatique crée à la longue une impression de monotonie. […] Prise séparément, chaque image nous émerveille. Mais, au-delà de cet émerveillement, nous ne ressentons rien, sinon le vague effroi et le triste dégoût que peut provoquer une réunion de monstres au milieu de cadavres. »

— Jean de Baroncelli, Le Monde, 20 décembre 1969.

« C'est un délire grandiose. Et d'une beauté plastique à vous couper le souffle. Une succession de plans dont on voudrait suspendre à chaque instant le flot, le temps d'admirer à loisir — et d'identifier — la référence implicite à tel ou tel peintre. […] Ce film est un film de peintre. Fellini-Satyricon donne l'impression d'un somptueux musée non plus imaginaire mais animé d'un mouvement à la fois ample comme celui d'un fleuve, et tourmenté comme si ce fleuve était coupé de rapides et de gouffres où tourbillonner. »

— Jean-Louis Bory, Le Nouvel Observateur, 15 décembre 1969.

Postérité

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Pour fêter les 50 ans de la sortie du film en France, le CNC rend hommage à cette œuvre du patrimoine cinématographique : « Le , la France découvrait l’adaptation d’un des plus mystérieux ouvrages de la littérature latine par Federico Fellini. Retour sur un classique du 7e Art. […] Un ouvrage essentiel dans la vie de Fellini. […] Une œuvre clé dans son parcours. À la fin des années 60, alors que Fellini se lance dans Satyricon, deux grands mouvements cinématographiques semblent en voie de disparition : la Nouvelle Vague et le Néo-réalisme. Pleinement conscient de ce moment de bascule, le cinéaste italien va donc pousser encore plus loin les curseurs de l’onirisme de son Juliette des esprits. Son Satyricon sera une œuvre à la démesure assumée, où il se débarrasse de ses oripeaux néo-réalistes pour trouver une inspiration nouvelle dans le foisonnement de la Rome de la décadence. […] Un film qui a divisé. En tissant des liens entre son époque et la Rome antique, rongée par une avidité de sexe, de bouffe et d’argent, Fellini a évidemment fait grincer des dents. Avec son style baroque et l’absence revendiquée de cadre, il a aussi perdu nombre de critiques en chemin [voir notamment les critiques de la section « Accueil »]. […] Le public français a tranché en faveur de Fellini en se déplaçant en masse à la découverte de Satyricon : plus de 1,2 million d’entrées. Le cinéaste italien ne fera jamais mieux dans la suite de sa carrière »[8].

Distinctions

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Récompenses

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Nominations

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Vidéographie

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Notes et références

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  1. Filmographie inexistante pour Mario Romagnoli, c'est sa seule prestation d'acteur ; crédité comme décorateur pour le film Trois hommes en habit (Tre uomini in frack) de Mario Bonnard en 1933 (source IMDb, sous réserve).
  2. Le label italien GDM a remasterisé la BO stéréo de Fellini Satyricon éditée précédemment par United Artists Records/Liberty Records sur 33 tours LP NAS 1241 (expurgée de La Danse des singes, enregistrement ethnique produit à l'origine par Le Chant du Monde).

Références

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  1. Didier Péron, « Ressortie en salles «Fellini Satyricon», sirop d’orgie », Libération,‎ (lire en ligne)
  2. a b et c Ciné-Ressources (Cinémathèque française).
  3. IMDb Full Cast & Crew (music).
  4. CNC, distributeurs du film.
  5. (en) Tino Balio, United Artists : The Company That Changed the Film Industry, Madison, University of Wisconsin Press, (ISBN 0-299-11440-6), p. 287.
  6. Ava, Mémoires (Ava: My Story) d'Ava Gardner, Presses de la Renaissance, 1991 (ISBN 2856165818).
  7. a et b Éditions Calmann-Lévy, 1984 (ISBN 2-7021-1309-5).
  8. Extrait de l'article « Le Satyricon de Fellini fête ses 50 ans » publié le .

Bibliographie

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  • Satyricon Redivivium, 100 photos noir et blanc prises en 1968 par Tazio Secchiaroli sur le tournage de Fellini Satyricon, texte tout en latin extrait du Satyricon de Pétrone, Éditions In Ædibus Rhinocerotis ferocis/Serge Plantureux, Paris, 2001.
  • On the Set of Fellini Satyricon : A Behind the Scenes Diary par Eileen Lanouette Hughes, texte en anglais avec photos noir et blanc — 248 pages. Éditions William Morrow and Company, Inc. New York 1971 — Library of Congress Catalog Card Number 78-124534.
  • Jean-Noël Castorio, Rome réinventée : l'Antiquité dans l'imaginaire occidental de Titien à Fellini, Paris, Vendémiaire, coll. « Chroniques », , 437 p. (ISBN 978-2-36358-328-4, présentation en ligne), [présentation en ligne].
  • Anne-Violaine Houcke, L'Antiquité n'a jamais existé : Fellini et Pasolini archéologues, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « PUR-Cinéma », , 371 p. (ISBN 978-2-7535-8594-2, présentation en ligne).

Liens externes

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