Étoile polaire

Localiser l'étoile polaire de l'hémisphère nord, Alpha Ursae Minoris, depuis la Grande Ourse.

Une étoile polaire est, de façon générale en astronomie, une étoile visible à l’œil nu se trouvant approximativement dans l'alignement de l’axe de rotation d’une planète, en particulier la Terre.

Actuellement, l’étoile polaire dans l’hémisphère nord de la Terre est Alpha Ursae Minoris (α UMi)[1], l’étoile la plus brillante de la constellation de la Petite Ourse, appelée aussi pour cette raison l'étoile Polaire (avec un P majuscule) en français ou Polaris en latin.

De nos jours dans l'hémisphère sud, il n'existe pas d'étoile polaire[2]. L'étoile Sigma Octantis (σ Oct, Polaris Australis), pourtant très proche de l'axe de rotation de la Terre est difficile à repérer à cause de sa magnitude faible.

Dans le but de localiser le pôle céleste Sud, ainsi que la direction du Sud, on recourt à des repères indirects, notamment à partir de la constellation de la Croix du Sud (voir plus bas).

L'idée parfois avancée d'utiliser Beta Hydri, de la constellation de l'Hydre mâle, comme étoile polaire Sud au motif de son éclat important est une approximation inadaptée dans la majorité des cas. En cause, son éloignement de presque 13° du pôle céleste sud fait qu'on ne peut trouver la direction du Sud qu'avec une incertitude de plus ou moins 13° sur l'horizon, soit une marge d'erreur de près de 26° !

Description

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Du fait de son alignement avec l’axe de rotation, une étoile polaire est perçue comme immobile par un observateur situé sur la planète, tandis que les autres étoiles visibles semblent décrire un mouvement circulaire autour de l’étoile polaire pendant la nuit.

Une étoile polaire est située près d’un des pôles célestes ; en navigation astronomique, sa position est un indicateur fiable de la direction d’un pôle géographique, et son altitude angulaire permet de déterminer la latitude[3].

Potentiellement, une planète possède deux étoiles polaires, une pour le pôle nord et l’autre pour le pôle sud, mais leur existence dépend de la configuration des étoiles : il peut ne pas y avoir d’étoile suffisamment visible à l’œil nu dans la direction d’un pôle. C'est d'ailleurs le cas actuellement dans l'hémisphère sud terrestre, où l'on localise, avec une marge d'erreur inférieure à trois degrés, le pôle céleste sud en prolongeant, en imagination, le pied de la constellation de la Croix du Sud d'une distance équivalente à quatre fois celle séparant les deux étoiles qui le constituent (le nom de la constellation de la Croix du Sud s'explique par ce rôle indispensable aux anciens navigateurs[4]).

Orthographe "étoile polaire" ou "étoile Polaire" (majuscule)

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Le terme étoile polaire correspond à deux définitions qui se rejoignent parfois, non systématiquement.

Lorsqu'on parle d'une étoile qui est définie comme étant "polaire" du fait qu'elle se trouve dans le prolongement de l'axe de rotation d'un astre, soit à l'aplomb du pôle géographique nord ou sud de l'astre, il s'agit d'un nom commun. Le mot "polaire" n'a donc là pas besoin d'une majuscule.

En outre, lorsqu'on parle de l'étoile alpha de la constellation de la Petite Ourse (Alpha Ursae Minoris ou α UMi[1]), dont la dénomination internationale est Polaris, on emploie souvent son nom propre français étoile Polaire. La majuscule porte sur le nom propre "Polaire", non sur le mot "étoile"[5].

L'étoile alpha de la Petite Ourse s'appelle étoile Polaire (nom propre en français) parce que c'est l'actuelle étoile polaire nord (nom commun) de la Terre et qu'on ne lui a pas conservé, en langue française, d'autres noms propres que celui qui correspond actuellement à sa fonction de repérage dans le ciel nocturne. Rappelons que la lettre grecque alpha n'est pas le nom propre de l'étoile, mais indique son classement par éclat décroissant selon la désignation de Bayer[6].

Changements séculaires d’étoiles polaires

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La projection du chemin de précession du pôle Nord sur le ciel fixe de l'époque J2000.0 pour l'intervalle de temps de 48 000 avant notre ère à 52 000 notre ère[7].

La direction de l’axe de rotation d’un objet céleste se modifie continuellement au cours du temps, sous l'événement principal du phénomène de précession des équinoxes. Par conséquent, une étoile considérée polaire (nord ou sud) à une époque, parce qu'elle est plus ou moins alignée avec l'axe de rotation de cet objet céleste à ce moment, ne pourra plus servir de repère polaire à un autre moment du cycle de précession des équinoxes.

La précession des équinoxes étant cyclique, une étoile qui était polaire à un moment peut le redevenir, à condition que son mouvement propre (son déplacement par rapport aux autres étoiles) ne l'ait pas excessivement écartée de la trajectoire à peu près circulaire du pôle céleste correspondant (nord ou sud) autour du pôle écliptique (également nord ou sud).

Sur Terre, le cycle de précession des équinoxes dure actuellement environ 26 000 ans[8]. De ce fait, l'axe de rotation pointe dans les mêmes directions nord et sud au terme de la même période, désignant comme polaires à peu près les mêmes étoiles d'un cycle à l'autre. Parmi les étoiles ayant été susceptibles de servir d’étoiles polaires à d’autres époques, on peut citer α Lyrae (Véga) (il y a environ 14 000 ans, mais de façon assez imparfaite, puisque jamais à moins de 5° du pôle nord céleste), Kochab, Pherkad, ι Cephei, κ Draconis, θ Bootis et α Draconis (l'étoile polaire nord avant Polaris).

Le tableau suivant regroupe les différentes étoiles de magnitude apparente inférieure à 3,5 qui seront les plus proches du pôle nord céleste à un moment donné du cycle de précession. Il ne s’agit pas forcément des étoiles visibles à l’œil nu les plus proches, et les valeurs numériques données sont des approximations très larges.

Étoile Magnitude
apparente
Période Distance minimale
Début Fin Année Angle (°)
Polaris 2,0 450 3100 2100 0,4
γ Cephei 3,2 3100 5300 4200 0,3
ι Cephei 3,5 5300 7100 6400 0,4
α Cephei 2,4 7100 9300 7600 3,6
η Cephei 3,4 9300 9400 9300 9,6
Deneb 1,2 9400 11600 10900 3,5
δ Cygni 2,9 11600 13700 12500 0,6
Véga 0,03 13700 15700 14600 3,9
π Herculis 3,2 15700 16900 16400 6,8
γ Draconis 2,2 16900 17600 16900 7,6
η Herculis 3,5 17600 19200 18000 7,9
ι Draconis 3,3 19200 23000 21300 3,1
Pherkad 3,0 23000 23100 23100 9,0
Kochab 2,1 23100 26200 24700 3,7
Trajet du pôle sud sur la voûte céleste, centré sur notre époque, dû à la précession.

Le tableau suivant fait la même chose pour le pôle sud céleste.

Étoile Magnitude
apparente
Période Distance minimale
Début Fin Année Angle (°)
β Hydri 2,8 1300 5100 4150 3,5
γ Hydri 3,2 5100 6300 5100 6,9
α Hydri 2,9 6300 7500 6500 8,5
α Reticuli 3,3 7500 8400 8400 9,4
α Doradus 3,3 8400 12100 10000 5,0
β Columbae 3,1 12100 13000 13000 9,8
ν Puppis 3,2 13000 15700 14700 0,2
σ Puppis 3,2 15700 17600 16600 1,1
γ Velorum 1,8 17600 19300 18500 1,1
δ Velorum 1,9 19300 19800 19300 4,4
φ Velorum 3,5 19800 20500 20500 1,5
κ Velorum 2,5 20500 21000 20800 0,1
N Velorum 3,2 21000 21500 21000 1,4
ι Carinae 2,2 21500 21800 21500 2,9
q Carinae 3,4 21800 22500 22400 2,1
θ Carinae 2,8 22500 23400 22800 0,6
ω Carinae 3,3 23400 27000 23900 2,4

Trouver le pôle céleste, Nord ou Sud, à l'aide des étoiles... Pourquoi et comment [9]?

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Localiser le pôle céleste de son hémisphère a essentiellement trois utilités. La première, situer les points cardinaux[10], puisque le pôle céleste Sud montre la direction du Sud, comme le pôle céleste Nord indique le Nord. Dans ce but, on tient compte de la direction horizontale (l'azimut) montrée par le pôle céleste. Le second usage permet de déterminer la latitude de l'observateur. Ici, c'est la hauteur sur l'horizon (l'angle entre l'horizon et le pôle céleste) qui est évaluée (principe du sextant). Troisième fonction : On peut "Mettre en station" un système de visée astronomique équatorial portant, par exemple, un télescope[11].

Du fait qu'une étoile est rarement reconnaissable par elle-même à l'oeil nu, on identifie plutôt l'étoile polaire ou le pôle céleste en recourant à plusieurs étoiles et constellations voisines.

Trouver le pôle Nord céleste en observant les étoiles

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Actuellement, dans l’hémisphère nord, l’étoile polaire est α Ursae Minoris (α UMi, en abrégé), appelée par conséquent l'Étoile polaire (avec une majuscule) en français[réf. souhaitée] ou Polaris en latin.

α UMi est une étoile brillante (la 48e plus brillante étoile du ciel actuel), ce qui la rend parfaitement adaptée pour indiquer le pôle nord céleste. Sa position moyenne (en tenant compte de la précession et du mouvement propre) atteindra la déclinaison maximale de + 89° 32' 23" en , soit 1 657 " ou 0,4603° du pôle nord céleste.[réf. souhaitée] Sa déclinaison apparente maximale (en tenant compte de la nutation de l’aberration) sera de + 89° 32' 50,62", soit 1 629 " ou 0,4526° du pôle nord céleste, le [12].

Afin de trouver et reconnaître à coup sûr Polaris, on prend généralement le repère de la constellation de la Grande Ourse. Pour mieux comprendre la méthode de localisation, on compare les sept étoiles principales d'Ursae Majoris à une casserole. L'étoile Polaire se trouve dans le prolongement du bord de la casserole opposé à la poignée. Plus précisément, on reporte cinq fois la hauteur de ce bord de la "casserole" ; l'étoile un peu moins lumineuse que l'on trouve là est la Polaire.

Trouver le pôle Sud céleste grâce aux étoiles

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Actuellement, σ Octantis (σ Oct, Polaris Australis) est l’étoile la plus proche du pôle sud céleste qu’il soit possible de voir à l’œil nu. Néanmoins avec une magnitude apparente de + 5,42, σ Oct est trop peu lumineuse pour être vraiment utile.

La technique la plus couramment employée situe approximativement, mais aisément, le pôle céleste Sud. On prend le repère de la [13]constellation de la Croix du Sud, considérée comme une croix latine (dont le bras le plus long serait normalement le pied). A partir du "poteau" (le pied augmenté de la branche supérieure) de la croix imaginaire formée par les étoiles de cette constellation, on reporte sa hauteur quatre fois et demie en direction de son pied. Le point virtuel trouvé se situe à moins de 3° du pôle céleste Sud[14].

Bien que certains citent β Hydri comme étoile polaire Sud, du fait de sa magnitude apparente de 2,80, son éloignement actuel de presque 13° du pôle céleste Sud en donne une approximation très insuffisante pour être utilisable précisément de nos jours. Cette étoile deviendra une polaire pertinente autour de l'an 4150, lorsqu'elle apparaîtra au plus près du pôle céleste Sud, à 3,5°.

Etoiles polaires d'autres corps célestes

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Sur d’autres objets célestes, il est possible de définir des étoiles polaires de façon analogue à celles de la Terre. L'axe de ces objets étant orienté différemment de celui de la Terre (inclinaison sur l'écliptique), les étoiles polaires résultantes diffèrent également.

Les étoiles polaires de la Terre et de la Lune
Astre Étoile polaire nord Étoile polaire sud
Terre α Ursae Minoris σ Octantis
Lune ο Draconis δ Doradus
Les étoiles polaires des autres planètes du Système solaire
Astre Étoile polaire nord Étoile polaire sud
Mercure ο Draconis α Pictoris
Vénus 42 Draconis η1 Doradus (en)
Mars Les deux étoiles de la pointe de la constellation du Cygne :
Sadr (γ Cyg) et Deneb (α Cyg)
κ Velorum
(à 2° du pôle sud céleste)
Jupiter À 2° de ζ Draconis À 2° de δ Doradus
Saturne Dans la région nord de la constellation de Céphée,
à 6° de Polaris
δ Octantis (en)
Uranus η Ophiuchi 15 Orionis
Neptune Entre γ et δ Cygni γ Velorum

Notes et références

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  1. a et b Séguin et Villeneuve 2002, p. 18.
  2. « Le ciel austral | Bernard Voyer Explorateur Inc. », sur www.bernardvoyer.com (consulté le )
  3. Séguin et Villeneuve 2002, p. 17.
  4. « La constellation de la Croix du Sud », sur Webastro, (consulté le )
  5. Éditions Larousse, « la Polaire ou étoile Polaire - LAROUSSE », sur www.larousse.fr (consulté le )
  6. « An Etymological Dictionary of Astronomy and Astrophysics - English-French-Persian », sur dictionary.obspm.fr (consulté le )
  7. (en) J. Vondrák, N. Capitaine et P. Wallace, « New precession expressions, valid for long time intervals », Astronomy & Astrophysics, vol. 534,‎ , A22 (ISSN 0004-6361, DOI 10.1051/0004-6361/201117274, lire en ligne)
  8. Éditions Larousse, « précession des équinoxes - LAROUSSE », sur www.larousse.fr (consulté le )
  9. Delphine Le Feuvre, « Pourquoi l'étoile Polaire est-elle si connue ? », sur Geo.fr, (consulté le )
  10. « Comment s'orienter dans la nuit ? | Espace des sciences », sur www.espace-sciences.org (consulté le )
  11. « Tuto vidéo : Comment faire la mise en station d'un télescope ? », sur Ciel & Espace (consulté le )
  12. Jean Meeus, Mathematical Astronomy Morsels, chap.  50,  éd. Willmann-Bell, Virginie, 1997.
  13. Jean-Baptiste FELDMANN, « Zoom sur la Croix du Sud, la plus petite des constellations », sur CIELMANIA : le blog de Jean-Baptiste FELDMANN, photographe du ciel, (consulté le )
  14. « Constellation de la Croix du Sud - Astronome amateur », (consulté le )

Bibliographie

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Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Marc Séguin et Benoit Villeneuve, Astronomie et Astrophysique : cinq grandes idées pour explorer et comprendre l'Univers, Montréal, ERPI, , 618 p. (présentation en ligne), « L'astronomie à l’œil nu ». Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

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Articles connexes

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Liens externes

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