Éva Gauthier
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Parentèle | Wilfrid Laurier (oncle) Zoé Lafontaine (tante) |
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Éva Gauthier, née le à Ottawa et morte le à New York, est une cantatrice canadienne mezzo-soprano et professeur de chant.
Éva Gauthier, au long de sa carrière, chanta et popularisa des œuvres musicales de compositeurs contemporains célèbres tels qu'Erik Satie, Maurice Ravel et Igor Stravinsky. Elle interpréta le rôle principal dans le mélodrame Perséphone, de Stravinsky.
Biographie
[modifier | modifier le code]Jeunesse et formation
[modifier | modifier le code]Joséphine Éva Pheobe Gauthier naquit le à Ottawa au sein d'une famille franco-ontarienne[2]. Elle est la sœur aînée de la mezzo-soprano Juliette Gauthier. Enfant, elle suivit des cours de musique, d'harmonie, de chant et de piano. Dès l'âge de 13 ans, elle suit des cours de chant avec le professeur Frank Buels[3].
La coutume de l'époque voulait que les musiciens nord-américains se rendissent en Europe pour parfaire leur formation, s'ils désiraient faire une carrière professionnelle respectable. En juillet 1902, à l'âge de dix-sept ans, Éva Gauthier partit donc pour l'Europe, voyage financé par sa tante, Zoé Lafontaine, et son oncle, le Premier ministre Wilfrid Laurier. En France, Éva Gauthier suivit les leçons de chant d'Auguste Jean Dubulle du Conservatoire de Paris. Des nodules furent détectés sur ses cordes vocales, qui furent enlevés chirurgicalement[2]. Peu après et durant plus de deux ans, elle s'exerça à réadapter ses capacités vocales avec Jacques Bouhy[4].
Carrière
[modifier | modifier le code]Eva Gauthier fait ses débuts parisiens en 1905[3]. Elle fut sollicitée par sa compatriote et chanteuse, la canadienne Emma Albani, à l'accompagner dans une tournée d'adieu au Canada l'année suivante[4]. Emma Albani joua un rôle de mentor pour Éva Gauthier lors d'une tournée de trente semaines à travers le Canada.
En 1909, elle revient en Europe et chante son premier opéra à Pavie en Italie où elle interprète le rôle de Micaëla dans le Carmen de Bizet[4]. Elle décroche un second rôle d'opéra dans l'interprétation de Mallika dans le Lakmé de Léo Delibes joué par l'orchestre londonien du Royal Opera House. L'opéra a ouvert ses portes en juin 1910 mais la cantatrice italienne Luisa Tetrazzini, la prima donna soprano italienne, craint que la voix de Gauthier n'éclipse la sienne[4]. La direction demande à Gauthier de se retirer de la programmation tout en lui promettant que d'autres rôles lui seront offerts[4]. Le directeur de l'entreprise accède aux demandes de Tetrazzini, en informant Éva Gauthier à la soirée d'ouverture qu'elle ne ferait pas la représentation[réf. nécessaire]. Éva Gauthier réagit mal, et quitte l'opéra et l'Italie[réf. nécessaire].
Elle décida de quitter également l'Europe et se rendit à Java où elle rencontra un homme d'affaires néerlandais, Frans Knoote, avec lequel elle se maria le [5]. Après son mariage, Éva Gauthier voyagea beaucoup et donna des spectacles en Chine, au Japon, à Singapour, en Malaisie, en Australie et en Nouvelle-Zélande[5]. Elle divorça plus tard de Knoote puisque la vie maritale ne s'agençait pas avec sa carrière musicale[5].
À Java, elle s'intéressa particulièrement à la musique javanaise qu'elle ajouta à son répertoire. On rapporte qu'elle aurait été la première femme occidentale à étudier le gamelan[5]. Elle demeura à Java pendant quatre ans, mais avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale, elle décida de revenir en Amérique du Nord, et débarqua à New York à l'automne 1914[6]. En 1917, elle se donna en concert au Æolian Hall à New York. Lors de ce concert, elle interpréta Trois chansons de Maurice Ravel et de Five Poems of Ancient China and Japan de Charles Griffes et Trois poésies de la lyrique japonaise d’Igor Stravinsky[6]. Par la suite, Gauthier créa plusieurs des œuvres vocales de Stravinsky en concert[7]. En 1919, elle participa au Festival de musique de chambre du Berkshire fondé par Elizabeth Coolidge[6].
En 1920, Éva Gauthier se rendit à Paris à la demande de la Ligue de musique d'Amérique, pour préparer et organiser la tournée en Amérique du Nord pour interpréter des œuvres de Maurice Ravel. Elle se lia d'amitié avec lui et s'ensuivit une correspondance professionnelle, non seulement avec lui, mais aussi avec Erik Satie et le groupe de musiciens dénommé Les Six. Durant les étés de 1922 et 1923, elle se rendit à Berlin afin de parfaire sa technique vocale auprès de Anna Schoen-René[8]. En 1923, elle donna au Aeolian Hall de New York un « récital de musique ancienne et moderne pour la voix » qui devint la première représentation historique chantée d'une œuvre du compositeur George Gershwin dans le cadre d'un récital de musique classique[2],[8]. Les critiques ont commenté l'événement comme étant l'entrée du "jazz raffiné" dans les salles de concert[8].
Les années suivantes, elle enchaîna avec d'autres œuvres majeures modernes et néo-classiques de musiciens contemporains tels que Vincenzo Bellini, Henry Purcell, Arnold Schoenberg, Darius Milhaud, Béla Bartók, Paul Hindemith, Irving Berlin et Jérôme Kern. Par ailleurs, l'audace d'Eva Gauthier dans le choix de son répertoire lui a permis de bâtir rapidement sa notoriété[8]. En revanche, certains criques ne l'appréciaient pas
Le 7 mars 1928, Maurice Ravel fêta son anniversaire chez elle, en présence notamment de George Gershwin[8]. La même année, Elle se rendit en Europe pour effectuer une dernière tournée[8].
Au début des années 1930, la maladie l'affaiblit. En 1931, elle donna néanmoins une représentation à La Havane à Cuba, mais dut réduire ses représentations en concerts publics.
Éva Gauthier mit fin à sa longue association avec Igor Stravinsky en interprétant, en première, le rôle-titre vocal de son mélodrame Perséphone, en mars 1935, puis en reprise en 1936 et 1937.
Fin de vie
[modifier | modifier le code]En 1937, elle met un terme à sa carrière musicale[8]. Elle est membre fondateur de la Guilde américaine des artistes musicaux et siège au conseil d'administration. Elle continue néanmoins à donner des cours de chant. Elle assiste aux récitals de ses élèves et d'autres chanteurs et participe à des campagnes de financement. Elle publie des articles sur ses expériences, dont celle du festival de musique contemporaine de Venise.
Éva Gauthier meurt le à New York, ville où elle habitait[10].
Galerie
[modifier | modifier le code]- En 1919
- Admirant ses portraits, 1915
- Se préparant, 1915
- Lettre d'Erik Satie à Eva Gauthier, 1920
- Programme, 1921
- A l'anniversaire de Maurice Ravel, avec Oscar Fried, Eva Gauthier, Ravel au piano, Manoah Leide-Tedesco (en) et Gershwin, mars 1928
- Profil, 1932
- Profil, 1932
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « https://archives.nypl.org/mus/22300 » (consulté le )
- Bibliothèque et Archives Canada, « Éva Gauthier, mezzo-soprano et professeure de chant (1885-1958) », sur www.bac-lac.gc.ca, (consulté le )
- Bernard K. Sandwell et, « Éva Gauthier », The Musical red book of Montreal, Montreal, F.A. Veitch, , p. 128 (lire en ligne)
- Gilles Potvin, « Un hommage à Éva Gauthier », Le Devoir, , p. 26 (lire en ligne)
- Wendy Mansell, « Great Canadian musical figures of the past: Eva Gauthier, 1885-1958 », Opera Canada, Toronto, vol. 37, no 2, Été1996, p. 9
- Nadine Turbide, « Éva Gauthier (1885-1958) : première cantatrice canadienne-française d’avant-garde », Les cahiers de l'association pour l'avancement de la recherche en musique au Québec, 7e série, , p. 65-78 (lire en ligne)
- « archives.nypl.org -- Éva Gauthier papers », sur archives.nypl.org (consulté le )
- « Éva Gauthier (1885-1958): Cantatrice d’avant-Garde (2e Partie) », sur my/maSCENA, (consulté le )
- Source : Bibliothèque et Archives Canada.
- « La cantatrice Éva Gauthier décédée », La Presse, , p. 10 (lire en ligne)
Bibliographie (ordre chronologique)
[modifier | modifier le code]- Turbide, Nadia. -- « Éva Gauthier - de Java au jazz ». -- Aria. -- Vol. 5, no 2 (juillet/août 1982).
- Turbide, Nadia. Biographical Study of Eva Gauthier, Université de Montréal, 1986.
- Sills, Herbert H. -- Éva Gauthier, mezzo soprano. -- Ottawa : Société historique d'Ottawa, 1986.
- «Éva Gauthier (1885-1958) : Première cantatrice canadienne-française d'avant-garde». -- Les Cahiers de l'ARMuQ. -- No 7 (mai 1988).
- «Gauthier, Éva». -- Encyclopédie de la musique au Canada. -- Sous la direction d'Helmut Kallmann et al. -- 2e éd. rev. et augm. -- Saint-Laurent, Québec. : Fides, 1993.
- Maurice Ravel, L'intégrale : Correspondance (1895-1937), écrits et entretiens : édition établie, présentée et annotée par Manuel Cornejo, Paris, Le Passeur Éditeur, , 1769 p. (ISBN 978-2-36890-577-7 et 2-36890-577-4, BNF 45607052) Contient 6 correspondances de Maurice Ravel à Eva Gauthier (1920-1930) n°1213, 1620, 1630, 2264, 2265 et 2298
Liens externes
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- Ressources relatives à la musique :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Bibliothèque et archives du Canada
- L'Encyclopédie canadienne
- Enregistrements d'Eva Gauthier sur Discography of American Historical Recordings.
- Eva Gauthier, Pionnière du Chant Moderne en Amérique, ou... La « Javanaise ». 30 octobre 2000. Festival SuperMicMac, hommage aux musiciennes canadiennes innovatrices. Co-production Les Productions « La Fille de l'Île ». Christine Lemelin, mezzo-soprano, conception, recherche, scénarisation, mise en scène, interprétation; Réjean Coallier, piano.
- Charles T. Griffes, Three Javanese Songs; Christine Lemelin, mezzo-soprano; Réjean Coallier, piano. Enregistrement réalisé à Montréal, automne 2000, pour le spectacle sus-mentionné.