Abandon de poste

En droit français, l’abandon de poste revêt deux significations, l'une en droit du travail, l'autre en droit de la guerre.

Droit du travail

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L'abandon de poste est le fait par un salarié de s'absenter de son lieu de travail sans justification, ni autorisation préalable de son employeur[1]. Pendant un abandon de poste, un salarié ne peut signer un nouveau contrat de travail.

Depuis la parution du décret n° 2023-275 du 17 avril 2023

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Depuis, le décret n° 2023-275 du 17 avril 2023 [2], l'abandon de poste du salarié peut désormais être considéré comme une démission sous réserve d'appliquer une procédure relative à la mise en œuvre de la présomption de démission en cas d'abandon de poste volontaire du salarié. L'employeur doit mettre en demeure le salarié de justifier son absence et reprendre son poste dans un délai préfixé qui ne peut être inférieur à 15 jours[3]. Un salarié qui reprend son travail dans les délais préfixé par l'employeur fait "tomber" la présomption de démission, mais n'enlève pas la possibilité à l'employeur de le sanctionner pour absence non justifiée.

La présomption de démission fera obstacle au droit à l’Assurance chômage. D'après une étude de l'Unedic, cette évolution du droit est de nature à réduire les dépenses engendrées par les démissions à terme comprises entre 380 M€ et 670 M€ sur une année selon l'évolution du comportement des employeurs et des salariés[4].

Avant la parution du décret n° 2023-275 du 17 avril 2023

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L'abandon de poste n'est pas prévu par le code du travail. C'est la pratique et la jurisprudence qui encadrent cette notion.

L’abandon de poste ne peut être considéré comme une démission qui, selon l’article L. 1237-1 du code du travail ne peut résulter que d’une manifestation non équivoque de la volonté du salarié de quitter son poste.

Le motif d’un licenciement pour abandon de poste est souvent un licenciement pour faute grave dans la mesure où le salarié manque à son obligation principale. La faute grave est caractérisée comme une absence injustifiée et prolongée du salarié malgré plusieurs relances de l’employeur.

Une pratique courante:

Lorsqu'un salarié souhaite mettre un terme à son contrat de travail mais qu'il se trouve face à un employeur refusant la rupture conventionnelle, le salarié peut abandonner son poste. Contrairement à la démission, l’abandon de poste qui va conduire à un licenciement, permet de bénéficier des allocations chômage, ce qui est donc avantageux pour le salarié. Cependant, en abandonnant son poste, le salarié ne respecte pas ses obligations contractuelles, ce qui peut présenter des risques.

L’employeur a la possibilité d'envisager des sanctions :

  • l’employeur peut engager une procédure disciplinaire, dans un délai de deux mois ;
  • l’employeur peut procéder au licenciement du salarié, il peut effectuer un licenciement pour cause réelle et sérieuse ou un licenciement pour faute grave.

Les risques de l'abandon de poste pour le salarié :

Si l’employeur tarde à engager une procédure de licenciement, le salarié ne perçoit aucune rémunération au titre de son emploi actuel. Ses droits au chômage ne sont, par conséquent, pas ouverts et le salarié ne peut être embauché pour un nouvel emploi. L’abandon de poste supprime ainsi toutes les sources de revenus. En abandonnant son poste, le salarié est susceptible de se voir suspendre sa rémunération comme l’a rappelé la chambre sociale de la Cour de cassation dans son arrêt du , n°09-41.280. Cette suspension de rémunération sera mentionnée sur le bulletin de salaire du salarié.

En revanche, l’abandon de poste peut parfois se voir justifié dans la mesure où l’employeur a effectué une modification unilatérale du contrat de travail de son salarié comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt en date du , n°99-41146. Elle peut aussi se voir justifié si le salarié a manqué une semaine de travail sans justification mais que ce manquement est le seul en 25 ans de carrière et que le salarié a toujours été irréprochable, c’est ce qu’a dit la Cour de cassation dans son arrêt rendu le , n°04-43.782.

D'après la jurisprudence, certaines situations empêchent la qualification d'abandon de poste. Parmi elles, le départ du salarié pour des raisons de santé, en cas de décès d’un proche, ou encore un danger avéré au sein même de l'entreprise.

La notion d’abandon de poste est très proche de celle d’absence injustifiée, mais si tout abandon de poste a pour conséquence une absence injustifiée, toutes les absences injustifiées ne constituent pas un abandon de poste. C'est le cas, lorsque le salarié reprend son poste après une absence non autorisée, même si ces absences, qui ne sont pas des abandons de poste, peuvent être sanctionnées. Les litiges relatifs à l'abandon de poste relèvent du conseil des Prud'hommes.

Droit de la guerre[5]

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L’abandon de poste au sein de l’armée est défini et traité dans le Code de justice militaire [6]aux articles L 324-1[7] et suivants. L’abandon de poste avec la désertion correspondent à l’abandon de poste des agents publics ou privés. Le poste ici correspond à l’endroit où le militaire doit se trouver à un moment donné pour l’accomplissement de la mission reçue de ses chefs. L’abandon de poste est sévèrement puni bien que les sanctions varient qu’il se soit déroulé en temps de paix ou en temps de guerre.

En temps de paix

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En temps de paix l’abandon de poste d’un militaire est punissable de 6 mois d’emprisonnement.

En temps de guerre

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L’abandon de poste en temps de guerre est sévèrement réprimandé, en effet lorsqu'un abandon de poste a lieu sur un territoire en état de siège, un territoire en état d’urgence ou lorsque la sécurité d’un établissement militaire, d’une formation militaire, d’un bâtiment de la marine ou d’un aéronef est menacée le coupable de cet abandon s’expose à une peine de 5 ans d’emprisonnement. Lorsque le coupable est le commandant d’une formation, de la marine nationale ou encore un chef de bord d’un aéronef militaire la peine encourue va se voir doublée. Certains facteurs peuvent aggraver cet abandon de poste et donc faire augmenter la peine encourue c’est notamment le cas si l’abandon de poste se fait en présence de l’ennemi ou d’une bande armée, la peine maximale pouvant être la réclusion à perpétuité. Il en va de même pour  le commandant d’une formation, d’un aéronef militaire, ou d’un navire militaire, qui, volontairement, en temps de guerre ou au cours d’opérations de guerre, ne maintient pas au combat sa formation, son bâtiment ou son aéronef, ou qui se sépare volontairement de son chef en présence de l’ennemi ou de bande armée tout comme le commandant d’un navire de commerce ou d’un aéronef convoyé ou réquisitionné, en temps de guerre ou au cours d’opérations de guerre, qui abandonne de manière volontaire le convoi dont il fait partie, ou qui désobéit aux ordres.

Notes et références

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  1. Abandon de poste : les 8 points incontournables à retenir, sur le site juritravail.com du 21 mars 2016, consulté le 14 avril 2016.
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047455109
  3. Article R1237-13 du Code du travail. Version 19/04/2023
  4. « Les abandons de poste et l'Assurance chômage », sur unedic.org (consulté le ).
  5. « Désertion et abandon de poste aux armées | Abandon de poste » (consulté le )
  6. « Code de justice militaire (nouveau) - LIVRE III : DES PEINES APPLICABLES PAR LES JURIDICTIONS DES FORCES ARMÉES ET DES INFRACTIONS D'ORDRE MILITAIRE », sur www.codes-et-lois.fr (consulté le )
  7. Code de justice militaire (nouveau) - Article L324-1 (lire en ligne)

Bibliographie

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  • Catherine Puigelier, Dictionnaire juridique, éditions Larcier, collection Paradigme, 2015, article « Abandon de poste », page 23.