Parti franciste
Parti franciste | |
Logotype officiel. | |
Présentation | |
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Président d'honneur | Marcel Bucard |
Fondation | 1933 |
Disparition | 1945 |
Siège | 22 Rue Vivienne 75002 Paris |
Journal | Le Franciste |
Hymnes | Hymne franciste Marche franciste |
Positionnement | Extrême droite[1] |
Idéologie | Fascisme Ultranationalisme Antisémitisme Collaborationnisme (1940-1945) |
Le Francisme, ou Parti franciste ou Mouvement franciste (1933-1944), était un parti politique fasciste dirigé par Marcel Bucard. Sous l'occupation nazie, le Francisme sera l'un des principaux partis collaborationnistes, derrière le Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot et le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat.
Le Francisme, ligue fasciste (1933-1936)
[modifier | modifier le code]La création : une scission de la MSN (1933)
[modifier | modifier le code]Le Francisme est créé en août- par Marcel Bucard (1895-1946), ancien séminariste et héros de guerre, qui était déjà passé par un bon nombre de mouvements nationalistes et fascistes (Action française, Faisceau, Solidarité française, Croix de feu, puis la Milice socialiste nationale) et le journal La Victoire du chantre du « socialisme national », Gustave Hervé. C'est d'ailleurs dans La Victoire de Gustave Hervé que le , Marcel Bucard annonce la future naissance du Parti franciste.
La création officielle a lieu le , à 23 heures, lors d'une cérémonie organisée à l'Arc-de-Triomphe de Paris. Marcel Bucard déclare alors vouloir : « (…) fonder un mouvement d'action révolutionnaire dont le but est de conquérir le pouvoir » et d'« arrêter la course à l'abîme »[2].
Le francisme est créé par scission de l’équipe de Gustave Hervé. Les premiers dirigeants du Francisme sont, en : Marcel Bucard, Jean-Baptiste Lhérault (venu de l’équipe de Gustave Hervé), Paul Lafitte (venu de l’équipe de Gustave Hervé), Louis Crevau (Les Petites affiches), Paul Germaix, Robert Sussfeld, Claude Planson, André Truchard, Maurice Larroux, Gaillout et quelques autres, mais aussi Léon Husson, ancien chef de cabinet du ministre modéré André Maginot[3].
Le francisme se veut tout de suite membre français d’une internationale fasciste. « Notre Francisme est à la France ce que le Fascisme est à l’Italie » écrit Bucard[4].
Développements (1934-1936)
[modifier | modifier le code]En 1934-1935, le Francisme est rallié par des hommes d'origines politiques diverses de droite comme de gauche, notamment plusieurs responsables départementaux et de rayons du parti communiste (tels Tavernier et ses camarades en Champagne). Pour obtenir ces ralliements, le Francisme soutient certaines grèves (telle celle du textile à Roanne en )[3]. En 1935, il est rejoint par Jean Pérault (ancien secrétaire général de la Fédération des Jeunesses communistes au VIIe Congrès de la JC et ancien membre du comité central du PC)[3]. En 1935, le Parti populaire socialiste national (PPSN) d’André Chaumet rejoint le Francisme[3].
Si un historien affirme que le Francisme « avait puisé dans la gauche et ses éléments et son esprit » (Eugen Weber[5]), il n’en reste pas moins que, peut-être en raison de la personnalité de Bucard, le Francisme gardera l’image d’un fascisme français clérical, catholique et réactionnaire. Ils déclarent à cette époque : « Notre philosophie s'oppose sur l'essentiel à celle de nos aînés. Nos pères ont voulu la liberté, nous réclamons l'ordre. Ils ont professé l'égalité, nous affirmons la hiérarchie des valeurs… » Le Francisme va également recevoir le ralliement des membres de la ligue d'extrême droite de la Solidarité française après la mort du président de cette dernière, François Coty († ). Le mouvement devient de plus en plus antisémite à partir de 1936.
Les francistes, que l'on nomme aussi les « Chemises bleues », portent l’uniforme et saluent à la romaine, comme la Solidarité française. Le francisme est doté d'un service d’ordre secret, La Main Bleue (dès 1933).
Malgré les ralliements et le soutien financier de l’Italie fasciste en 1934-1936, le Francisme ne décollera pas : les historiens ne lui accordent que 5 500 membres en 1934, tandis que le journal du parti, Le Franciste, ne tire qu’à 15 000 exemplaires en 1935[6].
Dans le cadre de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées destinée à « prendre des mesures exceptionnelles de défense républicaine en raison de la prolifération des ligues et de l'agitation qu'elles entretenaient dans la rue », le Francisme est dissous par le décret du , en même temps que d'autres ligues d'extrême droite.
La continuation après la dissolution (1936-1939)
[modifier | modifier le code]Cependant, de 1936 à 1939, le Francisme se poursuit sous deux appellations :
- l’Association des Amis du Francisme (1936-1937) ;
- puis le Parti unitaire français d’action socialiste et nationale (Pufasn) (1938). Organisé sur un modèle paramilitaire fasciste, fascisme dont il était par ailleurs le seul mouvement politique français d'extrême droite d'avant-guerre à se réclamer officiellement, il devait regrouper des militants activistes, peu nombreux mais très motivés et prêts à participer à des coups de main contre le régime. Au total, il ne dut guère rassembler plus de 8 000 adhérents avant 1939 pour atteindre un total de 12 à 13 000 après 1940.
Le Francisme, parti collaborationniste (1940-1944)
[modifier | modifier le code]Durant l'Occupation, le Parti franciste sera l'un des principaux partis collaborationnistes derrière le Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot et le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat.
Le , Marcel Bucard et Paul Guiraud (agrégé de philosophie, fils de Jean Guiraud, rédacteur en chef de La Croix) relancent le Francisme. Paul Guiraud tente de donner au Francisme une allure plus « socialiste ». De même, Bucard défend sous l’occupation la CGT (dissoute) et critique la Charte du travail élaborée par le régime de Vichy, jugée pas assez sociale (Lambert et Le Marec). Rien n’y fait cependant et, de nouveau, le Francisme conservera son image ultra-conservatrice[7].
Le Francisme sera, comme les autres mouvements de la collaboration, un échec. À son apogée (été 1943), il compte 5 500 membres (4 000 en province 1 500 en région parisienne) (selon Lambert-Le Marec) ou vers 8 000 (selon une autre source). Le journal Le Franciste atteint un tirage maximum pendant la guerre de 20 000 exemplaires, ce qui donne une idée de son audience maximale.
Sur le plan qualitatif, le Francisme est également un échec : « Le mouvement ne réussira pas à s’imposer. Le recrutement se fait de plus en plus au-delà de la très petite bourgeoisie qui l’emportait jusqu’alors, dans les milieux marginaux, chômeurs déclassés, travailleurs immigrés. »[8]
En 1943, le Francisme participe à l’éphémère Front révolutionnaire national, dominé par le RNP. Comme les autres partis collaborateurs, le Francisme s’implique fortement dans la collaboration militaire avec l’Allemagne (création des Équipes spéciales pour lutter contre la Résistance) même s’il voit la Milice de Vichy, concurrente, d’un mauvais œil. Nombreux furent ses membres qui participèrent à des opérations de police et de répression antisémite et anticommuniste. Particulièrement bien implantées dans les départements de Seine-et-Oise, du Morbihan et du Nord, ses sections locales furent impliquées dans de nombreux incidents d'une rare violence.
Le , un policier est tué et un autre blessé par les gardes du corps de Bucard lors d’une altercation. Le chef du Parti franciste est alors emprisonné à la prison de la Santé et manque d’être fusillé. Libéré le , il a juste le temps, devant l’avancée des Alliés, de fuir en Allemagne le avec les autres Francistes.
Alors que Guiraud est gracié, Bucard est finalement arrêté, jugé, condamné à mort le , et fusillé le suivant au fort de Châtillon, près de Paris. Face au poteau, il refuse le bandeau et une fois attaché, il s’écrie « Qui vive ? France ! » avant que la salve ne retentisse. On refuse à sa famille que son corps soit déposé dans le caveau familial et Marcel Bucard est enterré au cimetière parisien de Thiais, dans l’actuel département du Val-de-Marne.
Principaux membres du Francisme
[modifier | modifier le code]Dirigeants du Francisme sous l’occupation[9] :
- Chef : Marcel Bucard.
- no 2 et Action politique : Paul Guiraud (agrégé de philosophie).
- Organisation : F. Blanchard
- Propagande : Maurice Maurer (publicitaire, cofondateur du Parti français national-collectiviste en 1934, puis passe au Francisme sous l’Occupation).
- Action sociale : Godefroy Dupont.
- Jeunesse : Claude Planson (cofondateur du Francisme en 1933). La Jeunesse franciste se renforce en d’un bon nombre de cadres des JFOM qui venaient d'ailleurs du Francisme. Puis Robert Poïmiroo (à la place de Claude Planson à partir d’).
- Service d'ordre : docteur André Rainsart (ancien chef d'un minuscule Parti socialiste national indépendant dans les années 1930).
Le Francisme et l'antisémitisme
[modifier | modifier le code]Le Francisme de Marcel Bucard (1898-1946) inspiré de l’exemple mussolinien n’a originellement rien d’antisémite. Marcel Bucard attaqua même l’antijuif Henry Coston qui utilise le nom franciste car « quelques misérables individus, faisant profession d’antisémitisme, de sectarisme, de haine, essaient en se couvrant du nom de francistes, de créer la confusion dans l’opinion publique »[10],[11]. Ses articles vantent l’amitié des tranchées et la tolérance entre Français de toutes confessions. Il veut se distancier de « la petite secte, fondée récemment par un pauvre détraqué qui essaie de créer une confusion intéressée, en s’emparant de la même dénomination »[12],[13].
Bucard défend alors la thèse des deux Internationales qui déchirent la France : celle des socialo-communistes et celle des ploutocrates[14]. Il écrit à la LICA pour affirmer qu'il n'est ni anticlérical, ni antisémite, « ce qui est imbécile et odieux »[15].
Au congrès fasciste international de Montreux, il fait adopter des motions mitigées sur la « question juive » : le congrès se refuse « à une campagne de haine contre les Juifs » mais « s’engage à combattre certains groupes juifs », lesquels « se sont installés comme en pays conquis, constituant une sorte d’État dans l’État, profitant de tous les bienfaits, se refusant à tous les devoirs ». Accusé d’être un antisémite camouflé par la LICA, il proteste en mars 1935 dans L’Univers israélite en distinguant les « Juifs patriotes qui remplissent leurs devoirs et les métèques, sans patrie qui n’ont qu'un but : exploiter »[16].
Marcel Bucard bascule dans l'antisémitisme après son arrestation fin 1935 puis la victoire du Front populaire qui fait interdire son mouvement. Il attribue alors aux Juifs « une fonction de désagrégation sociale » et « un goût presque inné de la dépravation »[17]. Cet antisémitisme radical jouera un rôle important dans la propagande du parti franciste sous l'Occupation.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Laurent de Boissieu, « Parti Franciste (PF) », France Politique, (lire en ligne)
- Alain Deniel, Bucard et le Francisme, Éditions Jean Picollec, Paris, 1979, p. 6.
- Source : Lambert et Le Marec.
- 20 août 1933 dans La Victoire, cité par Lambert et Le Marec.
- Cité dans Robert Soucy, « Fascisme français ? », 2004, introduction page 24.
- Alain Déniel cité par Robert Soucy.
- Pascal Ory, Les Collaborateurs.
- Pascal Ory, Les Collaborateurs.
- Selon Lambert et Le Marec.
- Simon Epstein, Un paradoxe français : antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Paris, Albin Michel, coll. « Bibliothèque Albin Michel. Histoire », , 622 p. (ISBN 978-2-226-17915-9, OCLC 876574235), p. 167.
- Richard Millman, La Question juive entre les deux guerres. Ligues de droite et antisémitisme en France, Paris, éd. Armand Colin, 1992, p. 85, 93, 154-156.
- Simon Epstein, Un paradoxe français : antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Paris, Albin Michel, coll. « Bibliothèque Albin Michel. Histoire », , 622 p. (ISBN 978-2-226-17915-9, OCLC 876574235), p. 168.
- Marcel Bucard, « Aux Israélites de France », Le Franciste, février 1934.
- Marcel Bucard, « Sang et or », Le Franciste, 2 décembre 1934.
- « Une lettre de M. Marcel Bucard », Le Droit de vivre, 25 mars 1934.
- « Correspondance », L'Univers israélite, 8 mars 1935.
- Simon Epstein, Un paradoxe français : antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Paris, Albin Michel, coll. « Bibliothèque Albin Michel. Histoire », , 622 p. (ISBN 978-2-226-17915-9, OCLC 876574235), p. 169.
Annexes
[modifier | modifier le code]Sources
[modifier | modifier le code]Monographies
- Jean-Marc Berlière, « Francisme. Corps francs, Légion et Milice francistes, Main bleue… », dans Polices des temps noirs : France, 1939-1945, Paris, Perrin, , 1357 p. (ISBN 978-2-262-03561-7, DOI 10.3917/perri.berli.2018.01.0373 ), p. 373-385.
- Alain Deniel, Bucard et le Francisme, Paris, Éditions Jean Picollec, 1979.
- Arnaud Jacomet, Marcel Bucard et le mouvement franciste (1933-1940), maîtrise d'histoire, Université de Paris X Nanterre, 1970 (dir. René Rémond).
- Arnaud Jacomet, « Les chefs du Francisme: Marcel Bucard et Paul Guiraud », Revue d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale, no 97, 1975.
- Antoine Limare, « Entre nationalisme, fascisme et ambition politique. L'itinéraire du Franciste André Rainsart », 20 & 21. Revue d'histoire, no 155, 2022, p. 3-21.
- Antoine Limare, « Bucard ou Rainsart ? La crise du parti Franciste au printemps 1944 », Les Amis de l'Hémicycle, no 112, 2023, p. 4-25.
Ouvrages généraux
- Pierre Philippe Lambert et Gérard Le Marec, Partis et mouvements de la collaboration, Paris, Éditions Jacques Grancher, 1993.
- Pascal Ory, Les Collaborateurs, 1940-1945, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points. Histoire » (no 43), (1re éd. 1977), VI-331 p. (ISBN 2-02-005427-2, présentation en ligne).
- Robert Soucy, Fascismes français ? 1933-1939 : mouvements antidémocratiques, Paris, Autrement, 2004.