Tancrède de Hauteville (seigneur du Cotentin)
Tancrède de Hauteville | |
Statue représentant peut-être Tancrède de Hauteville, datant de 1875, remplaçant celle abîmée à la Révolution, située sur la face nord de la cathédrale de Coutances. | |
Biographie | |
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Dynastie | Hauteville |
Naissance | fin du Xe siècle |
Décès | vers 1041 |
Conjoint | Murielle Frédésende |
Enfants | Guillaume Drogon Onfroi Godefroi Serlon Béatrice Robert Mauger Guillaume Alfred Hubert Tancrède Roger |
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Tancrède de Hauteville (latin : Tancredus de Altavilla ; italien : Tancredi d'Altavilla, né vers la fin du Xe siècle et mort vers 1041) est un seigneur normand du XIe siècle, passé à la postérité pour être le père des frères de Hauteville qui firent la conquête de l'Italie méridionale sur les Byzantins (1040-1071), de la Sicile (1061-1091) et de l'île de Malte (1090) sur les Musulmans, tout en supplantant la vieille noblesse lombarde issue des principautés de Bénévent, de Salerne et de Capoue. À la faveur des croisades, ses descendants régnèrent aussi, au Proche-Orient, sur la principauté d'Antioche.
Biographie
[modifier | modifier le code]Petit seigneur normand de la région de Coutances dans l'ouest du duché de Normandie, il possédait un fief de dix chevaliers[1], assis à Hauteville. Des trois communes de la Manche portant le nom de Hauteville, aucun historien n’a pu identifier formellement laquelle a donné son nom au domaine de Tancrède, mais elle est traditionnellement admise comme étant Hauteville-la-Guichard[2].
Bon guerrier doté d'une force extraordinaire, Tancrède s'illustre notamment en tuant d'un seul coup d'épée enfoncée dans le front jusqu'à la garde, un gros sanglier qui avait chargé le duc Richard Ier de Normandie, lors d'une partie de chasse non loin de ses terres, en Cotentin. Pour le récompenser, le duc lui donne l'une de ses nombreuses filles (et peut-être aussi la sœur de cette dernière) et la direction de la garde ducale.
Voici ce que dit Aimé de Montcassin (qui écrit en Italie vers 1070) de Tancrède : « …Tancrède, seigneur de Hauteville au pays de Contentin en Normandie, vivait sous le duc Richard II (grand-père de Guillaume le Conquérant) qui l'eut en grande estime pour sa valeur à la cour et aux armées duquel il servait avec dix chevaliers de ses vassaux. Il était de l'ordre de ceux qu'on nomme barons, qui avaient droit de porter bannière en guerre et d'avoir cri de guerre… ».
De ses deux épouses successives, Murielle et Frédésende/Fressende de Normandie (v. 995-1057)[3], Tancrède a une quinzaine d'enfants dont au moins douze fils. Ne pouvant pas fournir à ses enfants des apanages suffisants, la quasi-totalité de ses fils, hormis celui qui hérite du fief de Hauteville (Serlon ?), partent à partir des années 1030 s'illustrer en Méditerranée, à la recherche de gloire, de fortune et de terres : ces guerriers ambitieux maîtrisant remarquablement la charge de cavalerie (aspect militaire absent en Italie du sud), jetèrent les fondations du futur royaume de Sicile (1130–1816).
Famille
[modifier | modifier le code]Ascendance
[modifier | modifier le code]On connaît très peu de choses du premier Tancrède de Hauteville[4]. Du Moyen Âge au XIXe siècle, on a voulu donner à Tancrède d'illustres origines :
- selon le chroniqueur Geoffroi Malaterra, d'origine normande, Tancrède appartenait à une famille très distinguée[5] ;
- l'historien italien Ptolémée de Lucques fait de Tancrède un descendant du chef viking Rollon, premier duc de Normandie[6] ;
- pour l'érudit sicilien Rocco Pirri, il serait l'un des fils du duc Richard II de Normandie ou de son demi-frère Guillaume de Brionne († 1058), comte d'Hiémois[7] ;
- le théologien danois Erik Pontoppidan fait de Tancrède de Hauteville un fils du duc Richard III de Normandie[8] ;
- pour l'historien allemand Johann Christoph Gatterer, Tancrède est issu d'un proche parent de Rollon[9] ;
- quant à l'historien français Jean-Baptiste Mailly (1744-1794), il dit de lui que quelques-uns le font descendre de Rollon[10].
Pour l'historien français Odon Delarc, ces affirmations sans fondement, qui se contredisent entre elles, n'ont pour origine que la fantaisie de leurs auteurs[11].
Descendance
[modifier | modifier le code]De sa première femme Murielle (Moriella), peut-être fille naturelle de Richard Ier de Normandie[12], morte prématurément, il a d'abord au moins cinq fils[13] :
- Guillaume (Willelmus), dit Guillaume Bras-de-Fer ;
- Drogon (Drogo) ;
- Onfroi (Humfredus) ;
- Godefroi (Gaufredus) ;
- Serlon (Serlo).
Il aurait eu également une fille, Béatrice, mariée à un fils du comte Robert d'Eu.
De sa seconde épouse Frédésende/Fressende de Normandie (Fres(s)endis, Fredes(s)endis) (v. 995-1057), il a au moins sept fils[14] :
- Robert (Robertus) dit Robert Guiscard l'Avisé (° apr. 1015-† ) ;
- Mauger (Malgerius) ;
- Guillaume le jeune (Willelmus) († 1080) ;
- Alfred ou Alvred (Alveredus) resté en Normandie ;
- Hubert (Hubertus : signalé en Italie où il serait devenu comte de San Nicandro[15] et serait mort en 1071[16]) ;
- Tancrède (Tancredus) ;
- Roger (Rogerius), futur Roger Ier de Sicile.
Il a également au moins deux filles, Frédésende/Fredesendis, mariée à un puissant prince normand d'Italie, Richard Drengot, comte d'Aversa (1049) et prince de Capoue (1058), et une autre dont le prénom nous est inconnue, venue rejoindre son frère Robert, et qui épousa un lieutenant de celui-ci, Geoffroy, comte de Conversano : de cette union naquirent six fils et une fille, Sybille, qui épousa Robert Courteheuse, le fils aîné de Guillaume le Conquérant[17].
Le Chronicon Amalphitani mentionne un autre fils de Tancrède, Frumentinus, qui aurait été son 11e fils[18]. Romuald de Salerne le mentionne également, peut-être influencé par le Chronicon Amalphitani[19].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Malaterra, I., 40.
- Malaterra, « Livre 1, chapitre 3 », sur www.unicaen.fr (consulté le ).
- Davy 2014, p. 69.
- (en) Généalogie de Tancrède de Hauteville sur le site Medieval Lands.
- Malaterra, De rebus gestis Rogerii Calabriæ et Siciliæ comitis et Roberti Guiscardi ducis fratris eius, I., 4.
- …Scribit Martinus, quod postquam Normanni quieverunt in terra Francorum, primus ipsorum Dux fuit Robertus (Rollon). Hic autem genuit Guillelmum : Guillelmus vero Richardum, hic autem secundum Richardum et Robertum Guiscardi qui Apuliam, et Calabriam devicit ac Siciliæ Insulam…, Historia Ecclesiastica Ptolomœi Lucensis, 1327.
- Odon Delarc, Les Normands en Italie depuis les premières invasions jusqu'à l'avènement de S. Grégoire VII (859-862/1016-1073), E. Leroux, 1883, p. 81.
- Gesta et vestigia Danorum extra Daniam, I., 121, 1741.
- Allgemeine Welthistorie. Halle. 4° XXXII. 78.
- Jean-Baptiste Mailly, Esprit des croisades, tome 2, p. 268.
- Delarc, Les Normands en Italie, p. 80-83.
- André Davy, Les barons du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Eurocibles, coll. « Inédits et introuvables du patrimoine Normand », , 319 p. (ISBN 978-2-91454-196-1), p. 82.
- Ordre selon Geoffroi Malaterra : …Tancredus nomine, duxit uxorem, moribus et genere splendidam mulierem, nomine [Moriellam], ex qua legali successione annorum quinque filios, postea futuros comites, suscepit: Willelmum videlicet cognomine Ferrea-brachia, Drogonem, Humfredum, Gaufredum et Serlonem.
- Ordre selon Geoffroi Malaterra : Ducta vero Frensendis vocabatur, generositate et moribus priore non inferior, quae legitimis terminis marito septem peperit filios, non minoris pretii vel dignitatis a praedictis fratribus, quorum nomina subtitulamus hic: primus Robertus, dictus a nativitate Guiscardus, postea totius Apuliae princeps et Calabriae dux, vir magni consilii, ingenii, largitatis et audaciae; secundus Malgerius, tertius Willelmus, quartus Alveredus, quintus Hubertus, sextus Tancredus, septimus Rogerius minor, postea Siciliae debellator et comes.
- Selon le Chronicon Amalphitani (…Humbinus Comes de Sancto Nicandro…)
- Selon le Breve chronicon Northmannicum.
- Davy 2014, p. 70.
- Chronici Amalphitani, fragmenta XXVIII, p. 364.
- Romoaldi Annales 1057, MGH SS XIX, p. 405.