Droit rom

Le kris (ou kriss, aussi appelé stabor) est une institution judiciaire rromani. Il s'agit d'une des manières principales de pratiquer les diverses traditions de droit rom[1]. On peut caractériser le kris comme une forme de justice réparatrice[2].

Étymologie

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Le terme rromani kris vient du grec krísi (κρίση), qui signifie le jugement. Le terme stabor vient peut-être de l'allemand Stab, qui a plusieurs significations[3].

Lorsqu'un divano (aussi écrit diwano), un différend entre des familles, ne peut plus être réglé entre elles, il est présenté au kris. Le kris est présidé par un krisnitor (ro) ou de plusieurs krisnitori[3]: dans le Sud-Est de la Roumanie, ils sont en général entre trois et sept et jamais plus de vingt[4]. Selon le krisnitor Mişu Mihai, les krisnitori ne sont pas rémunérés, ils peuvent avoir reçu une formation et ils jouent avant tout un rôle de médiateurs[5].

Aujourd'hui, les kris et le droit rom passent aussi beaucoup par des discussions entre les diasporas au moyen des technologies numériques[6].

Certaines notions d'honneur et de marime (en) jouent un rôle juridique important dans la vie rom[7].

Rapports avec les systèmes étatiques

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En Europe centrale, les États ne reconnaissent généralement pas les ordres juridiques roms[8]. Au contraire, la gouvernance rom est généralement contrainte de s'adapter dans une certaine mesure aux lois des États qui tentent de les contrôler[9]. En Roumanie cependant, une collaboration s'amorce entre kris et tribunaux étatiques[10].

Le droit rom est généralement dans un rapport de force désavantageux par rapport à l'État, ce qui le place dans une situation très similaire à celle des pratiques de droit autochtone[11]. Ainsi en Colombie, la Commission nationale du dialogue a recommandé de reconnaître les kris romani, de manière similaire à ce qui est fait dans le cadre de la justice autochtone paysanne communautaire[12].

Références

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  1. Gypsy Law: Romani Legal Traditions and Culture, University of California Press, (ISBN 978-0-520-22185-7, DOI 10.1525/j.ctt1ppwz9, lire en ligne)
  2. Dominika Lorek, « The Romani Model of Restorative Justice », Ruch Prawniczy, Ekonomiczny i Socjologiczny, vol. 74,‎ , p. 239 (lire en ligne, consulté le )
  3. a et b Yusuke Sumi, « Morphological Analyses of Rromani Terms Related to Law », Studia Universitatis Babes-Bolyai - Studia Europaea, vol. 64, no 1,‎ , p. 190–200 (ISSN 2065-9563, lire en ligne, consulté le )
  4. Herta 2016.
  5. (ro) Alin Ion, « Cum se face dreptatea în Stabor. Cei trei judecători, cei mai drepţi dintre ţigani: „Zburau securile, dar am reuşit să aducem pacea“ », adevarul.ro,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. (en) Juan F. Gamella et Francisco Javier Ogáyar-Marín, « Kris in the Digital Age. Transnational Legal Governance in a Roma Diaspora », (consulté le )
  7. (en) Jenni Berlin, « The moving-permit custom of the Finnish Roma », Romani Studies, vol. 25, no 2,‎ , p. 151–166 (ISSN 1528-0748 et 1757-2274, DOI 10.3828/rs.2015.6, lire en ligne, consulté le )
  8. Jan Bazyli Klakla, « The Attitudes Towards the Customary Law Within Roma Groups in Central Europe », The Polish Journal of the Arts and Culture, vol. 14, no 2,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. Jennifer Hu Corriggio, « Gitano Legal Codes: Social Change, NGO's, and External Legal Systems' Influence on Governance of Spanish Roma Communities », Michigan Journal of Race & Law, vol. 13,‎ 2007-2008, p. 1 (lire en ligne, consulté le )
  10. « Call the Witness - Romani Kris: Court of Common Consent » (consulté le )
  11. Nadire Özdemir, « HUKUKİ ÇOĞULLUK KAVRAMI VE GÖRÜNÜMLERİ: “ROMAN HUKUKU” VE “ABORJİN HUKUKU” », HFSA,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. https://www.minjusticia.gov.co/programas-co/fortalecimiento-etnico/Documents/Documentos/Protocolo%20Rom%20version%20final%202020_Digital.pdf

Bibliographie

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  • Claudia Andrea Rojas Venegas et Juan Carlos Gamboa Martínez, « La Kriss Romaní como sistema jurídico transnacional », Iconos. Revista de Ciencias Sociales, no 31,‎ , p. 43–55 (ISSN 1390-1249, lire en ligne, consulté le )
  • Claude Cahn, « Lawmaking in Traditional Romani Communities and International Human Rights Law and Norms: Case Study of the Real and Potential Role of the Romani Kris », European Yearbook of Minority Issues Online, vol. 7, no 1,‎ , p. 93–133 (ISSN 2211-6117, DOI 10.1163/22116117-90001630, lire en ligne, consulté le )
  • Mirinda Ashley Karshan, « Il diritto tradizionale della popolazione romanì tra kriss e judecátă: Traditional Romani law between kriss and judecátă. », Sociologia del Diritto, vol. 43, no 3,‎ , p. 163–180 (ISSN 0390-0851)
  • Christian Chereji et Constantin-Ciprian Sandu, « Romania: The Kris Procedures. A Brief Incursion in the Roma Community-Based Dispute Management Mechanism », Conflict Studies Quarterly,‎ , p. 3–11 (DOI 10.24193/csq.24.1)
  • Elena Marushiakova et Veselin Popov « The Romani Court in Central, Eastern and South-Eastern Europe » (lire en ligne, consulté le )
  • (en) Diána Szekeres, « Prospects and practices in East-Central Europe: Romani Cris, a cigánytörvény és a roma kultúra konfliktusmegoldásának tradicionális útjai, Romani kris- Tradicional ways of conflict resolution of the Romani Code and Roma culture », dans Multilingualism in Europe, MTA Nyelvtudományi Intézet, (lire en ligne)
  • (es) Juan Camilo Bustamante Cardona, El pueblo Rrom (gitano) y la Kriss Rromaní en el ordenamiento jurídico colombiano, 1998-2010, Universidad de Antiochia, (ISBN 978-958-8748-95-5, lire en ligne)
  • (hu) Diána Szekeres, « Romani Cris és a roma kultúra tradicionális konfliktusmegoldása », Büntetőjogi Tanulmányok XIII., MTA Veszprémi Területi Bizottság,‎ , p. 159–181 (lire en ligne)
  • (en) Diána Szekeres, « Romani Kris in Hungary, Romania and Finland », INTERNATIONAL JOURNAL OF EMERGING RESEARCH IN MANAGEMENT AND TECHNOLOGY (IJERMT), vol. 2, no 2,‎ , p. 76–80 (ISSN 2278-9359, lire en ligne)
  • Joy Kanwar, « Preserving Gypsy Culture through Romani Law in America », Vermont Law Review, vol. 24,‎ 1999-2000, p. 1265 (lire en ligne)
  • Giuseppe Beluschi-Fabeni, « Mangajmo, Našavel y Čačimo. Consenso y conflicto en los procesos matrimoniales entre 'roma korturare' rumanos en España. Un ejemplo de autonomía jurídica », Gazeta de Antropología,‎ (ISSN 0214-7564, DOI 10.30827/Digibug.24707, lire en ligne)

En Roumanie

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  • Levente Salat et Sergiu Mișcoiu, « Roma autonomous lawmaking – the Romanian case », dans Non-Territorial Autonomy and Decentralization, Routledge, (ISBN 978-1-003-03931-0, DOI 10.4324/9781003039310-12, lire en ligne)
  • Sergiu Mișcoiu et Laura Herța, « Résoudre les conflits à l'ancienne ? La pratique du droit coutumier rom en Roumanie », Les Cahiers de la Justice, vol. 1, no 1,‎ , p. 81–97 (ISSN 1958-3702, DOI 10.3917/cdlj.2101.0081, lire en ligne, consulté le )
  • Sergiu Miscoiu et Ioana Hritcu, « Le Kriss : peut-on parler de pluralisme normatif en Roumanie dans le cas de la minorité rom ? », Studia Universitatis Babes-Bolyai Europaea,‎ , p. 243–262
  • Claude Cahn, « Romani law in the Timiş County Giambaş community », Romani Studies, vol. 19, no 2,‎ , p. 87–101 (ISSN 1757-2274, lire en ligne)
  • Laura Maria Herta, « Le kris dans les communautés rom de Sud-Est de la Roumanie. Quelles sont les sources pour la légitimité des krisnitori et de la perpétuation du kris? », Studia Europæa, vol. 61, no 2,‎ , p. 149–164 (ISSN 1224-8746, lire en ligne, consulté le )

Liens externes

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